Les pesticides et leur impact sur la santé des femmes

Les pesticides et leur impact sur la santé des femmes

En guise d'introduction

“Pesticide” est un terme regroupant les insecticides, herbicides ou encore les fongicides, au sein des pesticides certains ont révélé des effets néfastes sur notre santé. On peut notamment citer les organochlorés comme le DDT qui est classé comme POP (Polluant Organique Persistant). L’ECHA (Agence Européenne des produits Chimiques) a classé plus d’une dizaine de pesticides comme ayant des propriétés perturbant le système endocrinien, mais d’autres substances rejoindront certainement cette liste. Dans cette article nous allons nous pencher sur les perturbateurs endocriniens et leur effets sur la santé humaine et plus particulièrement : la santé de la femme.

Définition

« Un perturbateur endocrinien est une substance ou un mélange de substances, qui altère les fonctions du système endocrinien et de ce fait induit des effets néfastes dans un organisme intact, chez sa progéniture ou au sein de sous-populations » (définition de l’OMS)

Depuis les années 1960, on sait que certaines substances ont la capacité d’agir sur le fonctionnement du système hormonal.  Le terme « Perturbateur Endocrinien » commence à être utilisé à partir de 1991 à l’occasion de la conférence de Wingspread, qui a conduit à l’émergence progressive de cette préoccupation environnementale devenue aujourd’hui, une préoccupation de santé publique mais aussi une préoccupation économique car les conséquences sanitaires directes et indirectes de l’exposition des populations aux perturbateurs endocriniens ont été estimées à 157 milliards d’euros par an de coût en matière de santé en Europe.

L’exposition aux perturbateurs endocriniens

Les populations humaines sont constamment exposées à des cocktails de substances chimiques, dont certaines ont des mécanismes d’action de perturbation endocrinienne, de façon directe (via l’air intérieur, les poussières, etc.) ou indirecte (via la chaîne alimentaire ou l’eau). De nombreux articles et produits de consommation courante contiennent et émettent des PE. Ils sont détectés de façon systématique dans l’urine, le sérum, le lait maternel et le liquide amniotique.

Il existe 5 voies de contamination :

➜ Voie digestive : eau, alimentation, emballages et contenants alimentaires, produits pharmaceutiques etc.

 ➜ Voie respiratoire : particules, émissions de peintures, matériaux, produits d’entretien, cosmétiques, pesticides, etc.

➜ Voie cutanée : produits cosmétiques, pharmaceutiques, pesticides, textiles, etc.

➜ Voie parentérale : dispositifs médicaux, etc.

 ➜ Voie fœto-placentaire et l’allaitement

Le mécanisme d’action des perturbateurs endocriniens

Les PE sont capables d’interférer avec la synthèse, le transport, le métabolisme, la fixation, l’action ou l’élimination des hormones naturelles, principalement de trois façons :

  • En se fixant sur les récepteurs hormonaux et en imitant l’action des hormones naturelles ou en bloquant les récepteurs hormonaux et en empêchant l’action des hormones naturelles, c’est ce qu’on appelle un effet antagoniste.
  • En modulant le métabolisme, la régulation ou le transport des hormones.
  • De nombreux PE agissent par les biais de mécanismes épigénétiques, c’est-à-dire en modulant les gènes qui s’expriment dans les tissus sans faire muter l’ADN.

Exemple de Perturbateurs endocriniens :

Une des substances, perturbant le système hormonal, les plus médiatisées est le bisphénol A aussi appelé BPA. Inscrite à la liste européenne des Substances Extrêmement Préoccupantes (SVHC) pour ses propriétés reprotoxiques. Reprotoxiques est un terme utilisé lorsque la substance a des effets pouvant altérer la fertilité de l’adulte ou le développement de l’enfant à naître.

Le BPA est interdit en Europe dans les biberons depuis 2011 et dans tous les plastiques en contact direct avec les aliments depuis 2015 pour la France et depuis 2018 pour l’Europe.

Il s’agit d’une molécule mimant les œstrogènes et créant, lorsqu’elle est absorbée une hyperoestrogénie favorisant, entre autres, les cancers du sein. Mais pas seulement, le BPA est fortement suspecté de favoriser des complications lors de la grossesse avec un risque plus élevé de malformations urogénitales. On retrouve d’autres molécules comme les phtalates, ayant un impact similaire sur la santé.

Les molécules modifiant le fonctionnement du complexe hormonale existent également dans les médicaments prescrits par les médecins. En effet, la prescription de pilules contraceptives agit sur le cycle hormonale, il en est de même pour certains traitements anti-cancéreux. D’autres molécules prescrites peuvent traverser la barrière placentaire lors de la grossesse comme le paracétamol qui est fortement suspecté d’affecter le fonctionnement testiculaire de l’enfant selon plusieurs études toxicologiques ainsi que des études réalisées sur modèle animal.

Ainsi au niveau des médicaments aussi il y a un risque pour la santé comme le distilbène R ou diéthylstilbestrol (DES) une molécule prescrite jusque dans les années 70 pour prévenir les fausses-couches. Aujourd’hui on sait que le DES favorise l’apparition des cancers du sein chez les femmes ayant été traitées mais favorise aussi le cancer du vagin de filles et même petites filles exposées in utéro. Les effets de ce médicaments subsistaient ainsi sur au moins trois générations, ce scandale a démontré pour la première fois une perturbation endocrinienne et un risque d’effets transgénérationnel chez l’Homme.

Enfin certains pesticides contiennent également des molécules perturbant le système hormonal comme la fameuse molécule DDT (Dichlorodiphényltrichloroéthane), pourtant interdite en France depuis les années 70 . Le DDT est un composé organochloré et comme vu précédemment Il a été démontré que certains composés organochlorés avaient un effet œstrogénique, donc la molécule est suffisamment semblables à certains œstrogènes pour déclencher une réponse hormonale chez l’homme, comme la molécule Bisphénol A. Les pesticides organochlorés ont également été associés à des effets sur le développement neurologique et même une baisse du QI. Il subsiste également des rémanences dans le sol, le DDT étant un POP, et globalement dans l’environnement jusqu’aux traces de DDT dans les aliments importés que l’on consomme. Le DDT en 2021 a été à nouveau sous le feu des projecteurs avec l’expertise collective de l’INSERM (résumé disponible sur notre site internet) qui a conclu sur une présomption forte d’un lien entre l’exposition professionnelle au DDT et les lymphomes non-hodgkiniens. Chez la femme, une présemption existe entre le DDT et l’apparition des cancers du seins, pourtant l’interdiction du DDT se base principalement sur son impact écologique.

Ainsi, les pesticides se trouvent dans l’environnement domestique et de nombreux produits du quotidien en contiennent, on peut citer les produits anti-insectes, acariens ou encore les produits contre les puces ou les tiques que l’on utilise pour nos animaux de compagnie.

Des études nommées Pest’Home (2019) et Pelagie (2016) ont été conduites par l’ANSES ( Agence Nationale de Sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’Environnement et du travail) ainsi que l’INSERM et révèlent certains chiffres :

  • 75% des ménages ont utilisés au moins un pesticide au cours de la dernière année
  • 83% des femmes utilisent des pesticides pendant leur grossesse, en particulier des pyréthrinoïdes. 

Ces chiffres colossaux révèlent un véritable enjeu de santé publique, en effet certains pesticides sont capables de perturber le fonctionnement de la thyroïde, le cycle menstruel et comme vu précedemment, favorise l’apparition de cancers du sein mais provoquerait également des avortements spontanés car certains PE sont capable de réduire et même d’inhiber la formation du placenta.

Le fœtus : cible des perturbateurs endocriniens environnementaux

Les perturbateurs endocriniens environnementaux ont vu leur production augmenter d’une façon exponentielle depuis les années 2000, on estime à près de 10 000 le nombre de substances considérées comme perturbant le système hormonal chez l’homme. Ces substances sont contenues dans les pesticides, les plastiques (comme le bisphénol A ou les phtalates) mais aussi dans les cosmétiques. 

Parmi les nombreux PEE qui contaminent la femme enceinte, à travers l’eau qu’elle boit, l’air qu’elle respire, les nutriments qu’elle ingère et les produits qu’elle adsorbe, un grand nombre d’entre eux risquent d’impacter le fœtus car le placenta ne représente pas une barrière de protection.

Il est apparu récemment que de nombreux PEE traversent le placenta pour impacter le fœtus et l’ensemble des organes et des tissus. Au sein du placenta humain, une étude de Van Overmeire et coll. montre la présence de pesticides, de retardateurs de flamme, de composés de filtres UV ou encore de parabènes (cosmétiques). Une autre étude américaine rapportait la présence de 287 PEE dans le sang du cordon de nouveau-nés, la contamination fœtale est donc un fait établi.

Les risques pendant la grossesse se concentrent sur les 3 premiers mois de vie utérine, une période importante qui conditionne la santé de l’enfant, entraînant même des pathologies durant la vie adulte.

Principales conséquences cliniques de la contamination intra-utérine :

  • En période néonatale : malformations des organes génitaux externes chez le garçon mais aussi retard de croissance. 
  • Pendant l’enfance : retards de développement psychomoteur (troubles du spectre autistique), obésité, puberté précoce chez la fille 
  • A l’âge adulte : chez la femme : risque de cancer du sein, insuffisance ovarienne prématurée, endométriose, syndrome métabolique, diabète de type 2, maladies cardiovasculaires, maladies hépatiques, maladie de Parkinson et chez l’homme : risque de cancer des testicules.<br>C’est pourquoi la vie intra-utérine représente une période de vulnérabilité maximale, il est plus que nécessaire d’imposer une protection rigoureuse contre cette épidémie discrète de grande ampleur. C’est un véritable scandale sanitaire mais aussi économique, social, éthique et juridique, la pollution fœtale par les PEE impacte le développement de l’homme, contribue à l’explosion des maladies chroniques chez l’adulte et représente une préoccupation majeure pour les générations futures. 

Pourtant, de nombreux scandales sanitaires sur des molécules prescrites comme le distilbène ou encore des contaminations délibérée comme l’agent Orange au Vietnam ont provoqué des malformations sur parfois plusieurs générations ce qui aurait déjà dû alerter les médecins et les responsables politiques sur les dangers des PEE chez la femme enceinte. 

L’inquiétude grandit chez les médecins, les chercheurs mais aussi chez les citoyens à cause du caractère omniprésent de ces perturbateurs endocriniens qui en plus de ça échappent aux principes de toxicologie classique où la dose fait le poison. En effet, nous avons abordé “l’effet cocktail”, ce phénomène se nomme ainsi car l’accumulation de différentes substances toxiques dans nos tissus crée une action de synergie et d’amplification de la toxicité dans notre corps.

La biosurveillance

La biosurveillance consiste à connaître le taux d’imprégnation de la population globale à des polluants et se pratique depuis plus de 20 ans. La problématique des PE est intégrée dans divers plans d’action nationaux, notamment par le biais de la Stratégie Nationale de Santé, la Stratégie Nationale sur les Perturbateurs Endocriniens, du Plan National Santé Environnement et du Plan Santé Travail. L’objectif de ces plans étant de proposer des mesures pour un environnement favorable à la bonne santé surtout pour les femmes enceintes et les enfants mais aussi dans le cadre professionnel.

La biosurveillance en France est pilotée par le programme national de biosurveillance en santé humaine et consiste à étudier et mesurer les concentrations de polluants dans des prélèvements biologiques, le plus souvent on retrouve des polluants dans les urines, le sang ou encore les cheveux. Ces études permettent d’avoir des valeurs de références d’imprégnation aux polluants à un temps donné dans la population afin de caractériser les sources d’expositions mais également de surveiller les évolutions des expositions à ces substances. Ils permettent également d’évaluer dans le temps l’efficacité des mesures mises en place et à mieux comprendre les modes d’imprégnation.

Depuis 2004 grâce aux actions des différents plans chlordécone, Santé publique France mène le volet biosurveillance de l’enquête Kannari pour améliorer les connaissances sur l’exposition des populations antillaises à ce pesticide et à d’autres substances présentes dans l’environnement.

Santé publique France a tiré plusieurs constats suite à ces études: 

  • Ces substances sont présentes dans l’organisme de tous les Français et les sources des expositions sont multiples (alimentation, habitat, extérieur).
  • Des expositions généralisées ont été mises en évidence pour les bisphénols, le PFOS, le PFOA et les phtalates appelés désormais “polluants du quotidien”.
  • L’exposition de la population aux métaux concerne l’ensemble des adultes et enfants, plus de 97% à 100% de quantification. 
  • Une imprégnation globalement en baisse pour les pesticides, mais des expositions non négligeables subsistent sur certaines substances pourtant interdites aujourd’hui.

Les valeurs de référence extraites de ces études sont indispensables à un meilleur suivi de la population française et de la réglementation. Les résultats sont aussi utiles pour identifier et agir sur les sources d’exposition.

  • Altération de la fertilité
  • Cancer du sein
  • Altération de la thyroïde
  • Avortement spontané

Mais il y a un mais… :

Bien que pour les médecins et chercheurs le lien entre exposition et effet n’est plus à prouver, l’évaluation de cette pollution se heurte à un système juridique incapable d’établir une lien de causalité. De plus, nos représentants, régulièrement en contact avec les lobbyistes de l’industrie des pesticides, reçoivent constamment des documents et faux articles de ces entreprises ayant pour intérêt de continuer à vendre leurs produits.

Cette même technique de manipulation avait déjà été utilisée par l’industrie du tabac il y a plusieurs années, appelée “fabrique de l’ignorance”, ou “fabrique du doute” leur but étant de noyer l’information scientifique et de donner de fausses informations aux dirigeants politiques afin d’éviter des législations trop contraignantes ou des poursuites judiciaires.

Ce lobby de pesticides représente des millions d’euros et les financements de pseudo-travaux pour créer une impression de controverse sont donc monnaie courante au sein de nos institutions censées nous protéger. Leur arguments :

  • Ils garantissent l’innocuité des produits chimiques
  • Ils utilisent l’argument d’une réduction de la production agricole sans pesticides
  • Chantage à l’emploi
  • Une absence d’alternative aux pesticides

Alors que la Charte de l’environnement garantit à chacun le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, que l’OMS précise que l’environnement représente l’un des déterminants de notre santé, rien ne semble évoluer assez vite pour protéger les générations futures. Pourtant en France, la garantie des droits des enfants impose dans ses textes la protection et la surveillance rigoureuse du fœtus. De plus, le risque d’une transmission transgénérationnelle suite à l’impact des pesticides sur notre organisme commence à être de plus en plus documenté.

Conclusion :

Il est clair que les données scientifiques sur le sujet sont suffisantes pour nous permettre de confirmer un lien entre l’exposition aux pesticides et autres perturbateurs endocriniens et la survenue de pathologies graves au sein de la population et particulièrement pour les femmes enceintes. Il est urgent d’établir de nouvelles manières de communiquer l’information aux dirigeants et d’avoir une réflexion éthique sur la pollution par les pesticides de notre environnement car nous sommes redevables pour les générations futures du désastre sanitaire à venir. 

Des solutions existent réellement, l’agriculture raisonnée ou biologique n’a pas diminué la production agricole ni l’équilibre économique des pays. Certains pays comme le Danemark ont même privilégié la protection de l’environnement et la santé des danois sans subir de dommages économiques sur la production.

Pour connaître les bonnes pratiques à adopter lorsqu’on devient parents, rendez-vous sur le site 1000-premiers-jours.fr.

Ce site met à disposition les informations scientifiquement validées les plus récentes, en lien avec les besoins fondamentaux de l’enfant. La rubrique « Agir sur son environnement revient sur l’importance de connaître les diverses sources d’exposition (substances chimiques, allergènes, perturbateurs endocriniens) pour limiter les risques et offrir un environnement sain et sûr à son enfant. De façon pratique, le site propose de nombreux conseils sur les gestes à adopter au domicile et à l’extérieur.

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