Les alternatives aux pesticides par PachaGaïa

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L’utilisation des pesticides au sens large du terme est aujourd’hui si répandue et associée si évidemment à l’agriculture dans l’inconscient et le conscient collectif qu’il est difficile d’imaginer une agriculture sans pesticides

En parallèle, les questionnements toujours plus importants qu’ils suscitent en termes de santé publique et de préservation de l’environnement font du développement d’une agriculture plus saine un débat au cœur des enjeux du moment tant et si bien qu’il n’est pas aisé de démêler le vrai du faux. 

Peut-on concilier le fait de nourrir l’humanité et de proposer une agriculture plus respectueuse du monde dans lequel nous vivons ? Peut-on ré-instaurer une part de biodiversité dans nos environnements ?

A tractor

USAGE DES PESTICIDES EN FRANCE

Selon le ministère des solidarités et de la santé, les pesticides regroupent l’ensemble des substances utilisées pour la prévention, le contrôle ou l’élimination d’organismes indésirables qu’il s’agisse de plantes, d’animaux (insectes, acariens, mollusques etc…), de champignons ou de bactéries. 

En 2020, plus de 65 000 tonnes de substances actives ont été vendues en France dont 12,2 % concernent encore les produits les plus préoccupants pour la santé humaine. 

A l’échelle européenne, il est estimé que la contamination par les produits phytopharmaceutiques induirait des pertes allant jusqu’à 40 % au sein de populations. Les impacts sur la diversité des invertébrés terrestres et aquatiques sont principalement documentés pour les insecticides, les néonicotinoïdes et les pyréthrinoïdes apparaissant comme les familles de molécules les plus impliquées parmi celles étudiées.

Des impacts sont également recensés dans les populations d’oiseaux de chauve-souris ou encore d’amphibiens. 

Pour aller plus loin sur cet aspect, vous pouvez retrouver notre article dédié, basé sur le rapport d’ IFREMER et de l’IRAE sur l’impact des pesticides sur l’environnement.

produits phytopharmaceutiques

Représentation conceptuelle des effets possibles des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité, les processus écologiques et les fonctions écosystémiques à travers leurs interrelations (traduit de Pesce et al., 2022)

DES SOLUTIONS À L'ÉCHELLE INDIVIDUELLE

agriculture du vivant

A l’échelle individuelle, de nombreuses solutions sont possibles pour développer un jardin sans pesticides chimiques.

Cet article présente succinctement trois concepts partants tous du même postulat : favoriser une agriculture du vivant et encourager les synergies entre espèces au service d’une alimentation pérenne et résiliente en ne s’attardant plus uniquement sur les rendements court terme. 

La permaculture :

permaculture

La permaculture est une approche rencontrant un nombre croissant d’adeptes. Il ne s’agit pas à proprement parler d’un type d’agriculture mais d’une manière d’aborder la culture consistant en un processus de design écologique itératif divisé en trois étapes s’inspirant de la nature : observation, compréhension et rétroaction. Le but est d’optimiser l’espace à sa disposition en apportant le minimum d’intrants supplémentaires à ce qui existe déjà et d’itérer année après année avec ce qui a le mieux fonctionné. Il ne s’agit donc pas de répliquer une unique méthode à grande échelle mais d’appliquer la méthode locale qui fonctionne le mieux.

Le jardin alimentaire :

garden

Très ludique, le « foodscaping » ou « jardin alimentaire » devient de plus en plus tendance. Il combine culture alimentaire et plante d’ornements par le biais de légumes et fruits de saisons, plantes aromatiques et fleurs comestibles afin de répondre au dicton « aussi beau que bon ! ».  Cette pratique s’adapte très bien aux petits espaces et permet un développement aussi bien à la campagne qu’en ville.

L’agroforesterie :

forest

Au contraire du « jardin alimentaire », la « forêt-jardin » nécessite un espace plus important pour permettre son développement. Elle consiste en la création d’un espace forestier, dans son jardin, en intégrant les 7 strates d’une forêt naturelle à savoir les grands arbres, les arbres nains, les grands arbustes et buissons, les plantes herbacées, les plantes à racine profonde, les plantes couvre-sols et les plantes grimpantes en utilisant au maximum des plantes comestibles afin de produire fruits, baies, légumes, plantes médicinales ou encore champignons de manière durable, autonome et résiliente. Cette pratique impose cependant une période peu fructueuse pendant quelques années afin de permettre à cette « mini forêt » de se développer mais les bienfaits étant si nombreux qu’il n’est pas exagéré de dire que le jeu en vaut la chandelle. 


Que ce soit développer son propre jardin ou contribuer à des jardins collectifs, ces initiatives sont d’excellents moyens de recréer une bulle de biodiversité et de recréer un lien avec la nature qui se perd de plus en plus avec notamment le développement toujours plus rapide des espaces urbains dans lesquels il est bien souvent difficile de s’y retrouver.  Agir pour la biodiversité c’est aussi agir à son échelle pour encourager les « petit coin de paradis ».

DES SOLUTIONS À L'ÉCHELLE COLLECTIVE

Il est de bon ton de dire qu’une agriculture sans pesticide est utopique, bienfaitrice et souhaitable sur le papier mais surtout destinée aux « écolos faisant leur petit jardin personnel » car en pratique il est impossible de s’en passer pour nourrir l’humanité, pour des questions de rendements notamment. 

Le postulat de départ fait ici est pourtant incomplet. Notre entretien avec Marie, une maraîchère bio, nous a prouvé le contraire ! On peut évidemment nourrir l’humanité sans pesticides de synthèse.  Mais, il n’est effectivement pas possible du jour au lendemain d’obtenir les mêmes quantités de produits d’alimentation en changeant nos pratiques mais nos pratiques n’étant ni vertueuses pour l’environnement ni pour notre santé, il n’est pas nécessaire de s’y attarder.

L’idée est surtout de faire évoluer les besoins d’une société très consommatrice afin de faire évoluer la demande et permettre une alimentation raisonnée et salvatrice pour la santé de celles et ceux qui pratiquent l’agriculture et celles et ceux qui en consomment les produits. 

En partant plutôt de ce principe, il est alors possible de développer une « agroécologie ». L’institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) le décrit dans son rapport Ten Years For Agroecology (TYFA) comme étant « une trajectoire d’innovations des systèmes agricoles visant à maximiser l’usage des processus écologiques dans le fonctionnement des agroécosystèmes, en vue d’atteindre une alimentation durable ».

Redonner la priorité à la biodiversité et permettre son développement en valorisant le vivant présent dans les sols plutôt que de l’appauvrir, en favorisant les synergies entre les espèces, par exemple en utilisant des plantes recouvrantes permettant de garder l’humidité du sol et d’être ainsi plus résilient aux aléas météorologiques ou encore en encourageant la présence d’espaces non cultivés de prairies, de haies ou d’arbustes véritables refuges pour la biodiversité et ainsi, faire bénéficier aux cultures des merveilles dont-elles regorgent. 

Il ne s’agit pas de plier la nature à ses besoins ou de la remplacer mais de la favoriser au service d’une agriculture pérenne et bénéfique pour tous le vivant. 

Dans un monde fortement soumis au changement climatique, il est nécessaire d’apprendre à s’adapter, une monoculture dont le rendement est maximisé sera ainsi moins résiliente aux changements de températures qu’une polyculture favorisant les bienfaits de tout un écosystème.

agroecologique

Une Europe agroécologique en 2050 : une agriculture multifonctionnelle pour une alimentation saine, rapport IDDRI, 2018

UN CHANGEMENT DE PARADIGME

Il n’existe probablement pas de recette miracle permettant de remplacer totalement une agriculture productiviste par une agriculture raisonnée sans efforts et en ne changeant pas ses habitudes de consommation, ses habitudes alimentaires et ses préjugés. 

A titre d’exemple, l’alimentation en Europe est trop calorique et déséquilibrée par rapport aux recommandations nutritionnelles de l’Autorité européenne de sécurité alimentaire (EFSA). 

Il est par ailleurs possible qu’avec le changement climatique, la destruction accélérée du vivant et l’appauvrissement des sols, les techniques actuelles ne permettent plus dans un avenir proche de répondre aux exigences croissantes de consommation et ce d’autant plus vrai avec l’accroissement de la population.

Pour permettre une agriculture pérenne et durable ne nécessitant pas un apport constant de produits diverses, il est nécessaire de changer de paradigme pour produire assez et non plus le plus possible afin de revenir à une agriculture locale et réfléchie répondant à sa fonction première au regard des défis des futures années : nourrir l’humanité tout en préservant la biodiversité et en s’adaptant au changement climatique.

Sources : 

  1. Une Europe agroécologique en 2050 : une agriculture multifonctionnelle pour une alimentation saine, rapport IDDRI, 2018
  2. Définition pesticides ministère des solidarités et de la santé, https://solidarites-sante.gouv.fr/sante-et-environnement/risques-microbiologiques-physiques-et-chimiques/pesticides/
  3. Etat des lieux des ventes et des achats de produits phytopharmaceutiques, Ministère de la transition écologique, https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/sites/default/files/2022-03/datalab_essentiel_270_etat_des_lieux_phyto_mars2022_0.pdf 
  4. Impact des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les services écosystémiques, https://www.generations-futures.fr/wp-content/uploads/2022/05/2022_04_29_pestiecotox_resume_web.pdf , Résumé de l’Expertise scientifique collective, INRAE & IFREMER
  5. Podcast « Permaculture, paysage nourricier, forêt -jardin, biodynamie, etc de Radio légume & companies Spotify

EFSA, (2017b). EFSA Comprehensive European Food  Consumption Database. European Food Safety Authority  – https://www.efsa.europa.eu/en/food-consumption/ comprehensive-database.

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